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Débuts de Textes - Textes sans but
13 septembre 2007

Les yeux des hommes du Sud

Les visages sont tendus, blêmes. Les yeux, fixes, ne voient plus rien depuis longtemps. Les lèvres jointes, envie et angoisse mêlées, laissent à peine filtrer - comme à regret - quelques paroles d'un hymne que la respiration commune d'un stade conquis porte pourtant jusque là. Les corps massifs, comme faits de bois, certains nerveux et vifs, d'autres semblables à des rocs indestructibles, sont raides et figés. La tension est là, présente, pesante, comme un 16ème homme indésirable qui se serait pourtant invité sur le champ de la bataille à livrer.

Tout à l'heure l'adversaire, qui ne sera jamais l'ennemi, hurlait son amour du Pays, sa foi en des valeurs que ses pères défendaient et portaient avant lui. Soudés, agrippés en une étreinte presque sensuelle, les hommes du Sud, fiers, pleuraient alors.

Les nôtres sont restés droits, statues vivantes, comme insensibilisés ou comme, peut-être, trop sensibles, ayant épuisé leurs capacités à réagir par des larmes libératrices ou une ardeur décuplée.

Le regard des hommes du Sud n'est pas dur, il n'est pas agressif. Il est haut et serein. Dans la nuit, ces hommes tomberont peut-être mais ce sera alors avec bravoure. Ils le savent. Nous le savons. Leurs mains étreignent leur maillot comme si elles voulaient s'arracher le coeur et l'offrir à ces Dieux qui vont décider de leur destin.

Les regards se cherchent et se fuient à la fois. Les mains se serrent, automatiques. Un sourire crispé, un geste fugace traduisent parfois en un court instant l'amitié, le respect.

L'heure est au combat, aux chocs et au style, au terrain à gagner, à celui à défendre, aux souffrances, aux espoirs, à la peur, à la rage. La terre promise depuis longtemps, ligne blanche qui se dérobe ou qui s'offre, est l'ultime but d'une si courte vie de 80 minutes.

Tout à l'heure les hommes du Sud ont dompté l'adversaire.

Leurs yeux, tournés vers la lumière, voyaient combien seule la victoire est belle.

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